La Commission européenne fait la sourde oreille aux citoyens

Jamais une consultation publique de la Commission européenne n’avait encore mobilisé autant de voix citoyennes. C’est désormais chose faite avec l’ISDS, un mécanisme controversé qui figure dans le traité de libre échange TTIP. La réponse de la Commission face à la fronde populaire ? Organiser plus de consultations.

Cecilia Malmström is als Europees commissaris voor Handel verantwoordelijk voor het TTIP-verdrag

Cecilia Malmström est responsable du traité TTIP en tant que commissaire européenne au Commerce.

A Bruxelles, les yeux étaient rivés sur  la Commission : quelle réponse apporter aux résultats de la consultation publique portant sur l’ISDS (Investor-State dispute Settlement) ? Retour dans le temps : un an auparavant, la Commission décidait de sonder l’opinion publique suite à la polémique entourant le mécanisme de l’ISDS contenu dans le TTIP. La mobilisation a été au rendez-vous : 150 000 citoyens européens ont fait entendre leur voix. En guise de comparaison, l’écho des consultations antérieures à propos de la politique commerciale de l’UE n’avait encore jamais dépassé la barre du millier de réactions. Et pourtant, en dépit de cette mobilisation massive et du fait que 97% des répondants ont clairement affiché leur refus, l’ISDS est toujours à l’ordre du jour.

« La Commission a l’intention de reprendre la consultation des parties intéressées à partir du premier trimestre de 2015 », stipule la Commission européenne dans un rapport de 140 pages paru deux semaines auparavant suite à la consultation. « Y compris les Etats membres et le Parlement européen. » La Commission a par ailleurs indiqué sur son site que la question de l’ISDS ne sera pas tranchée avant « la dernière étape des négociations ».

L’opposition à l’ISDS ne cesse de gronder. Et pour cause, les dispositions renfermées dans ce mécanisme habilitent les entreprises à porter plainte contre les Etats qui les léseraient en instaurant de nouvelles réglementations ou des mesures jugées nuisibles. Un tel scénario a récemment été illustré par une affaire opposant la compagnie d’électricité suédoise Vattenfall à l’Etat allemand. Ladite entreprise a ainsi réclamé 3,7 milliards d’euros au motif que la décision gouvernementale de sortir du nucléaire, prise au lendemain de Fukushima, lui était préjudiciable. Selon ses détracteurs, l’ISDS induirait un phénomène de « regulatory chill », à savoir un plafond au-delà duquel les autorités ne peuvent plus légiférer dans l’intérêt public.

Si la Commission venait à les ignorer, elle donnerait raison à ceux qui la considèrent vendue aux intérêts industriels.

Si l’on en croit le député européen Verts Bart Staes, la Commission européenne s’opposera à l’ISDS. « L’initiative citoyenne rejetant le TTIP a recueilli plus de 1,2 millions de signatures. En outre, ils ont été des dizaines de milliers à justifier leur opinion sur la base de véritables arguments. Si la Commission venait à les ignorer, elle donnerait raison à ceux qui la considèrent vendue aux intérêts industriels. »

En définitive, il appartiendra au « super-commissaire » néerlandais Frans Timmermans de trancher. « Sans l’accord de Frans, l’ISDS ne figurera pas dans le TTIP », avait déclaré en octobre de l’année passée le président de la Commission Jean-Claude Juncker devant le Parlement européen. Juncker avait également promis que « l’ISDS ne briderait pas la compétence juridictionnelle exercée par les tribunaux des Etats membres », une allusion à l’arbitrage en vase clos prévu par l’ISDS.

Reste à savoir si les Américains, officiellement partisans d’un mécanisme ISDS pur et dur, approuveront les restrictions proposées par Juncker. De leur côté, les opposants aux dispositions de l’ISDS redoutent que le traité actuel ne subisse le même sort que le CETA, le traité de libre-échange entre l’UE et le Canada. En effet, les négociations avaient alors été bouclées au sein de la Commission et le traité validé, de peur de réduire à néant tous les efforts déjà consentis.

« C’est précisément ce qu’a déclaré Cecilia Malmström [commissaire au Commerce de l’UE, NDA]. On a ainsi fait savoir au Parlement européen qu’en raison de l’ampleur du chemin parcouru, il ne pourrait plus faire machine arrière en écartant l’ISDS des accords de négociation, affirme la députée néerlandaise Anne-Marie Mineur (PS). Quant au traité du CETA, qui comprend les clauses de l’ISDS, il est désormais ficelé mais doit encore être soumis à l’approbation du Conseil et du Parlement européens. La date du vote n’a pas encore été communiquée.

Selon Mineur, toute la polémique nimbant l’ISDS du TTIP éclipse une bombe à retardement que pourrait bien déclencher la ratification du CETA. « La majeure partie des entreprises américaines possèdent un paquet d’actions au sein d’entreprises canadiennes. Si le CETA devait voir le jour, elles pourront d’ores et déjà faire valoir le mécanisme de l’ISDS sur le sol européen. »

Les groupes de pression entrent en scène

C’est pourtant l’ISDS du traité transatlantique EU/USA qui fera parler de lui à Bruxelles au cours des mois à venir. A l’approche de la prochaine salve de consultations organisée par la Commission, groupes d’action et lobbyistes d’entreprise affûtent leurs armes avant de repartir au combat. Les groupes de réflexion installés à Bruxelles seront également de la partie.

C’est dans ce contexte qu’EurActiv.com, un site d’infos de l’UE abondamment lu, a affiché un ardent plaidoyer en faveur de l’ISDS du TTIP. Son auteur, un dénommé Diego Zuluaga qui travaille pour EPICENTER (un groupe de réflexion basé à Bruxelles), entend favoriser les « principes d’une société libre ». Le financement d’EPICENTER provient d’« un mélange de particuliers, fondations et entreprises », dont l’identité précise n’est toutefois pas révélée.

Il résulte de la consultation que seules les grandes entreprises se réjouissent de l’ISDS ; les petites entreprises se montrent en revanche « plus critiques. »

Zuluaga étaye volontiers son point de vue. « L’ISDS vise à traiter les investisseurs étrangers de façon équitable. D’où l’importance de les protéger contre d’éventuelles mesures gouvernementales arbitraires en leur accordant une compensation pour les dommages encourus. » A l’entendre, les petites et moyennes entreprises seront les premières à tirer leur épingle du jeu. « Elles n’ont pas à leur disposition des juristes pour exploiter au mieux les tribunaux étrangers. » Il résulte pourtant de la consultation que seules les grandes entreprises se réjouissent de l’ISDS ; les petites entreprises se montrent en revanche « plus critiques », selon le rapport de la Commission.

Zuluaga jette par ailleurs la suspicion sur les résultats de la consultation dans son ensemble. Selon ses dires, la plupart des envois viennent de sites appartenant à des groupes d’action, qui useraient en l’occurrence de formulaires pré-remplis. « Il va sans dire que l’étendue des réactions négatives soulevées à l’encontre de l’ISDS du TTIP traduit une inquiétude réelle », concède-t-il. « Mais il reste à déterminer dans quelle mesure des groupes militants s’emparent de l’ISDS dans le but d’exprimer leur opposition au traité de libre-échange TTIP en tant que tel. »

Il n’empêche, Staes souhaite voir la Commission européenne rayer ledit mécanisme des traités commerciaux conclus avec les USA et le Canada. « L’arbitrage d’investissement dote les multinationales d’un instrument de poids pour contester les réglementations jugées contraires à leurs intérêts. On aboutit ainsi à une situation dans laquelle les législateurs européens, craignant de faire l’objet de demandes de dédommagements colossales, se diront bientôt : ‘laissons tomber ces normes environnementales plus contraignantes pour les voitures, sinon on risque d’avoir General Motors ou Ford sur le dos.’ Cet évidement de la démocratie sous couvert de la protection des multinationales doit cesser. »

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