L’impact de la crise économique

Un Flamand sur cinq n’a plus confiance en sa banque
Six pour cent des Flamands a changé de banque suite à la crise financière, soit un nombre énorme selon les spécialistes. Un quart a vu baisser son revenu et un sur cinq a perdu confiance en sa banque. Voilà quelques résultats remarquables issus d’une enquête de MO* sur l’approche de la crise économique.

Un quart des personnes interrogées a vu baisser son revenu à cause de la crise. Les personnes avec un revenu plus bas et une éducation moins élevée sont touchées relativement plus.


Geert Noels, directeur délégué d’Econopolis et auteur de Econoshock: ‘Cela ne m’étonne pas. La moitié de la population reçoit son revenu de l’Etat. En fait il est inquiétant que si peu de gens ressentent les effets de la crise, car elle est bien réelle. Je voudrais qu’il y ait plus de solidarité avec les personnes affectées, les personnes qui perdent leur emploi. Ce serait possible en réduisant les salaires des fonctionnaires et les pensions, ce qui entraînerait une baisse du coût salarial et dès lors une baisse du nombre de licenciements.

Paul De Grauwe, professeur d’économie à la KU Leuven, n’est pas d’accord: ‘La protection sociale et les accords salariaux dans un pays comme la Belgique font que, en effet, l’impact sur le revenu est plutôt limité. De ce fait, la récession n’est pas si profonde. La proposition de réduire les salaires, ne me semble pas une bonne idée, en tout cas pas pour cette crise. Il s’agit d’une crise de la baisse de la demande et une telle mesure ferait baisser encore plus cette demande.

Deux personnes sur trois sont contentes que le gouvernement ait sauvé les banques. Probablement ce n’est pas un hasard si les personnes de plus de 55 ans avec les avoirs d’épargnes les plus grands constituent la majorité. Relativement plus d’entrepreneurs indépendants et d’ouvriers ne sont pas d’accord.


De Grauwe : ‘Cela indique que les gens comprennent apparemment que ne pas préserver les banques de la faillite aurait causé des dommages beaucoup plus graves. L’aspect positif, c’est que pour une fois nous avons effectivement apprise notre leçon de l’histoire et, contrairement aux années trente, nous n’avons pas laissé tomber les banques.

Rudy De Leeuw, président du syndicat socialiste ABVV, se sent conforté par ce pourcentage élevé. ‘Nous avons toujours défendu le sauvetage des banques, même si nous avions espéré de socialiser les banques afin d’apporter aussi les connaissances financières nécessaires à l’Etat. A l’heure actuelle, l’on a nationalisé les charges et privatisé les avantages. Heureusement, il y a une correction maintenant que les banques sont obligées à contribuer aux finances publiques.’

Deux personnes sur trois affirment faire encore tout à fait confiance à leur banque. 21 pour cent a perdu cette confiance, chez les ouvriers le chiffre monte même jusqu’à 30 pour cent.


Le professeur De Grauwe le trouve un pourcentage énorme après ce qui est passé. ‘Je suis sûr que le chiffre aurait été beaucoup plus bas si le gouvernement n’avait pas sauvé les banques. Les gens expriment donc plutôt leur confiance dans le système et la garantie publique liée à ce système.

Six pour cent des personnes interrogées a changé de banque.


Noels : Au fond c’est énorme, considérant la difficulté avec laquelle les gens changent de banque. Par ailleurs, ce chiffre ne dit rien sur le nombre de personnes ayant ouvert un compte chez différentes banques. Ce chiffre est beaucoup plus élevé.’ Febelfin, la Fédération belge des institutions financières, ne pouvait pas donner des chiffres exactes sur le nombre de personnes ayant changé de banque.

55 pour cent des personnes interrogées est d’avis que le gouvernement doit obliger les banques et les institutions financières à investir l’argent qui leur est confié dans la lutte contre le changement du climat.


Noels n’est pas d’accord: ‘Cela ne sert à rien d’obliger. Les banques ne feront pas d’investissements verts si elles ne font pas assez de profit et pour cela, les frais environnementaux réels doivent être calculés dans les prix. Dans ce cas-là, les investissements verts grimperont au plafond, comme on a pu voir lors du prix de pétrole élevé. L’appât du gain reste le stimulus le plus fort, c’est la nature des gens. Les gens et les banques n’ont pas décidé d’investir dans l’internet parce qu’ils étaient obligés, mais bien parce qu’ils croyaient pouvoir faire du profit. Voilà la recette idéale pour les investissements verts également.

Noels ne croit pas qu’il faut attendre des actions volontaristes de la part du secteur financier. ‘Ce qui est néanmoins possible, c’est que les autorités émettent des obligations pour des investissements verts afin d’offrir une possibilité aux gens qui souhaitent investir leurs épargnes dans des affaires vertes. C’est possible, mais cela aurait un moindre effet. Je répète: la hausse du prix de pétrole a eu plus d’effets que tout le processus de Kyoto. Nous avons un peu de chance. Comme par un hasard divin, les réserves de pétrole ont atteint leur limite juste au moment où la crise du climat va de pire en pire.
Selon le professeur De Grauwe, les autorités peuvent stimuler la rentabilité des investissements verts par le biais de subventions et de prix correctes: ‘De cette façon, l’on évite que les banques se retrouvent avec des mauvais crédits parce qu’elles se lancent dans les mauvais investissements verts.’
Le professeur Hans Bruyninckx (KU Leuven) trouve qu’on peut bien demander aux banques de s’orienter plus vers les investissements durables. ‘Dexia et CBC – et surtout Triodos – ont pris des initiatives en matière de placements durables. Nous pouvons en attendre bien plus.’

45 pour cent des personnes interrogées est d’avis que les autorités ne doivent pas intervenir dans le secteur financier, c’est aux banquiers de résoudre cela. 43 pour cent est convaincu du contraire.


Noels: ‘A mon avis, 43 pour cent qui trouve que les autorités doivent intervenir, c’est beaucoup, surtout que l’on penserait peut-être automatiquement que l’Etat ne doit pas s’y mêler. Cette opinion est évidemment motivée par le fait que dans notre pays, bien quatre banques importantes ont rencontrées des difficultés. C’est énorme.’
Rudy De Leeuw estime que, à la suite de la crise, nous avons atteint un point de non retour.
‘Les gens veulent que nous nous opposions au fondamentalisme du marché ainsi qu’à la croissance des inégalités issues du capitalisme. N’oublions pas que les transactions financières dans tout le monde sont cinquante fois plus grandes que l’économie réelle. Quelle est l’utilité sociale de tout cela? Cette couche de ‘capitalisme de casino’ en dessus du capitalisme réel nous n’apporte rien. La classe politique ne l’accepte plus. De ce fait, l’Union Européenne se prononce maintenant pour la taxe Tobin. D’ailleurs, pour ceux qui n’y croient pas, je prévois que nous devrons faire attention à ne pas créer une nouvelle bulle de savon en matière de prix des droits de CO2.

Deux sur trois trouve que les banques ont une responsabilité sociale, qu’elles doivent faire plus que faire du profit.


Noels: ‘Je suis content qu’une majorité trouve cela important. Seulement, cela n’indique pas jusqu’où cette responsabilité doit mener, puisque c’est la définition de cette responsabilité sociale qui entraîne la discussion. S’agit-il d’une gestion correcte des outils de travail, de discrimination positive des minorités dans la politique d’embauche? Pour ainsi dire. Le minimum d’après moi, c’est que le secteur bancaire ne met pas l’économie en péril, qu’il ne fait pas de dégâts à l’économie réelle alors que c’est exactement ce qui s’est passé et ce qui montre que les banques n’ont pas pris suffisamment de responsabilités.

De Grauwe: ‘Cette réaction ne m’étonne pas. Le profit n’a de toute façon pas de bonne réputation. Si l’on croit que les banques ne doivent pas uniquement faire du profit, qu’est-ce qu’on entend par là? Cette fois-ci, les banquiers ont cherché le profit à court terme et rejeté le risque sur la société. Après nous le déluge, c’était un comportement presque criminel. Si les banques se décident pour un profit à long terme, elles prennent déjà beaucoup plus de responsabilités, mais ils n’investissent pour autant pas encore dans l’économie verte.’

Selon le professeur Bruyninckx, les banques qui déclarent couvrir une fonction sociale, devraient s’inscrire également dans un nombre de dynamiques nouvelles, dont la durabilité en est une.

21 pour cent des personnes interrogées investirait ses épargnes chez une banque que le gouvernement créerait maintenant. 76 pour cent ne le ferait pas.


Geert Noels le considère un peu hypocrite. ‘Tout le monde est content qu’il y ait une garantie publique, mais l’idée d’une banque publique ne plaît qu’à peu de gens. Tandis que cette garantie publique crée quand même beaucoup de problèmes aussi: les petites banques sont désavantagées parce que leur faillite ne constitue pas de risque du système et qu’elles peuvent donc compter moins sur ce soutien d’Etat.’
Le professeur De Grauwe ne s’étonne pas sur le nombre relativement bas de partisans d’une banque publique: ‘Cela indique la grande méfiance lorsqu’il s’agit de la capacité des autorités de gérer une entreprise. En soi c’est étonnant: l’Etat peut sauver les banques, mais il ne peut pas les gérer. Ainsi les contribuables y perdent et les actionnaires y gagnent. Afin d’éviter cela, j’ai défendu l’idée que l’Etat prendrait les banques en main pendant quelque temps pour qu’une partie du profit futur serait encaissé par le contribuable.

N’est-ce pas idéologique de supposer qu’une banque publique soit synonyme d’inefficacité ? Le CGER fonctionnait quand même plutôt bien?


De Grauwe : ‘En effet. Je pense que depuis lors, une grande méconfiance vis-à-vis des services publiques s’est affirmée. Une visite au tribunal, c’est une cause perdue. Dans un environnement mêlé, avec des banques privées sur le marché également, une banque d’Etat peut fonctionner plutôt bien d’après moi. C’est prouvé, il y a dans ce cas-là assez de pression du marché afin de garder un certain niveau de services.
Rudy De Leeuw est un peu déçu que l’idée d’une banque publique n’ait pas plus de partisans. ‘Nous avons perdu cette tradition et maintenant il est difficile de la relancer. Avec le CGER et partiellement le Crédit Communal, on avait des banques publiques qui recevaient plus de 21 pour cent des épargnes. Voilà des résultats économiques de rêve. A cette époque, la confiance était bien là, mais apparemment les gens ne s’en souviennent plus. Enfin, 21 pour cent est un point de départ, mais le potentiel est beaucoup plus grand selon moi.’
Peter Tom Jones, ingénieur et expert en matière du climat, s’étonne que bien des gens estiment que les banques ont une responsabilité sociale tandis que seulement un sur cinq est pour une banque d’état. ‘Pourtant cette responsabilité sociale ne sera reprise que par les banques publiques ou par les banques coopératives. Voilà ce qui servira en plus à gérer effectivement les problèmes du climat.’

Paul De Grauwe (KUL) et l’avenir: ‘J’ai peur rien que d’y penser’

Il est clair entre-temps que les risques énormes pris par les banquiers – la spéculation en vue d’une maximisation du profit – se trouvent en partie à la base de la crise. Le fait que les autorités les ont sauvés – ils sont trop grands pour ne pas les préserver de la faillite puisqu’ils risquent d’entraîner le système entier dans leur chute – fait augmenter la possibilité qu’à l’avenir ils prennent à nouveau des risques fous. A moins que les autorités prennent les mesures nécessaires maintenant.

Le professeur Paul De Grauwe (KU Leuven) n’est pas optimiste : ‘Les mesures présentées par l’Union européenne et les Etats-Unis ne suffisent pas pour éviter une répétition. Maintenant qu’on est en crise, le problème ne se pose pas encore. Le problème est plutôt le contraire : les banques ont tellement peur du risque qu’il n’y a pas assez de crédit. Une fois l’économie rétablie, les banques se relanceront dans des produits dont elles ne comprennent pas bien les risques. J’ai peur rien que d’y penser.’

Que faut-il faire alors?
Une séparation entre les banques de dépôt, où vous et moi, nous déposons notre argent, et les banques d’affaires – comme c’était le cas jusqu’aux années nonante. Cela doit éviter que les banques communes s’engagent dans ces transactions financières sophistiquées et s’exposent ainsi à des risques sans transparence. Les banques d’affaires qui se risquent trop loin, peuvent faire faillite. Les banques à dépôt, en cas de crise, doivent être reprises par l’Etat. De toute façon, les actionnaires doivent être punis, sinon on leur invite à prendre de nouveaux risques aux frais de l’Etat. Chez nous cela s’est vu uniquement chez Fortis : à cause de l’actionnariat fragmenté, l’influence politique se fait beaucoup plus difficile. Dexia et CBC par contre ont réussi à se sauver, respectivement par le biais d’organisations et de familles influentes. En Belgique il n’y avait donc pas de ligne claire. 

Pourquoi ne décide-t-on pas de séparer les banques d’affaires des banques de dépôt ?
Les banques sont contre. Point. Elles font comme si ça serait un retour au Moyen Age, avec une croissance limitée et peu de crédit. Mais ce ne sont que des histoires, puisque quand la croissance était-elle la plus importante? Lorsque la séparation était une réalité, de 1950 jusqu’en 1970. L’influence politique des banques est énorme.

Si les mesures ne satisfont pas, pourquoi y a-t-il tellement peu de critique?
La grande majorité des gens ne comprend pas vraiment ce monde financier. Et la plupart des journalistes croient les histoires des banquiers.


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