Les pays en voie de développement submergés d’aide

Du 2 à 4 septembre, les pays riches et pauvres se réunissent à Accra, au Ghâna, afin de trouver des accords quant à une meilleure organisation de l’aide mondiale au développement. Moins de fractionnement, une meilleure coordination, plus de contrôle exercé par les pays en voie de développement sur les projets, les programmes et les investissements : des objectifs auxquels personne ne s’opposera. D’où alors le progrès difficile?
Lors du « Third High Level Forum on Aid Effectiveness » à Accra, l’Europe doit parler d’une seule voix et jouer un rôle de pionnier, estime Bernard Petit, vice-directeur-général auprès de la Commission européenne chargée du développement et des relations avec les pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique. Il insiste notamment sur l’importance d’une meilleure coordination dans l’aide au développement. 
“Dans le secteur de la santé publique en Tanzanie, pas moins de six cent projets qui disposent chacun d’un budget inférieur à un million de dollars, sont actuellement en exécution. Au Kenya, l’achat de médicaments se fait par l’intermédiaire de vingt donateurs qui font appel à treize agences. Représenté dans un diagramme, cela ressemble plus à un plan de câblage d’une complexe installation électrique quelconque qu’à un plan efficace et maîtrisable qui permette de procurer de médicaments aussi bons que possible à un maximum de gens.”
“Tandis qu’au début des années 1960 le nombre de donateurs bilatéraux s’élevait à sept, aujourd’hui il a augmenté à 53. En outre, nous voyons apparaître de plus en plus de fonds dits verticaux, qui  investissent énormément d’argent dans un seul domaine. À titre d’exemple : il existe dix de ces fonds rien que pour le changement climatique, et ils font tous en grande partie le même travail.”
Le fractionnement évoqué par Petit est le plus frappant dans les pays les plus démunis, alors que ce sont exactement ces pays qui ont le plus de problèmes à gérer les missions. Ainsi, la Banque mondiale fait remarquer que la Tanzanie a reçu pas moins de 541 missions d’aide en 2005.
Selon Daniel Ottolenghi, Chief Development Economist auprès de la Banque européenne d’investissement, ce pays ne constitue pas une exception : « Dans trente pays en voie de développement qui se trouvent parmi les plus démunis, les gouvernements reçoivent au moins une mission d’aide par jour, tout au long de l’année. Par conséquent, ils sont obligés de consacrer beaucoup de temps à l’accomplissement des exigences imposées par les donateurs au lieu de concevoir et de réaliser eux-mêmes une politique de développement. »
Son opinion est partagée par Akihiko Nishio, directeur Concessional Finance and Global Partnerships auprès de la Banque mondiale ; il confirme que l’aide reçue par les pays récepteurs entraîne pour eux des frais hors de toute proportion. « En 1960 le gouvernement d’un pays en voie de développement avait affaire en moyenne à douze pays partenaires. Aujourd’hui cette moyenne a augmenté à 32. De plus, la destination de l’argent investi dans le développement est de plus en plus déterminée soit dans le pays donateur soit par le donateur international, bien que tout le monde reconnaisse l’importance de mettre les pays du Sud en charge de leur propre processus de développement. »
Bernard Petit opine que les ministres européens de la Collaboration au développement plaideront donc à Accra pour l’abolition tout court de la politique d’exigences imposées, qui constitue en effet le plus grand obstacle à cette prise en charge par les pays du Sud. À part cela, l’UE définit comme objectifs principales une répartition concrète des tâches entre les donateurs, le respect des lignes politiques définies par les pays en voie de développement mêmes, ainsi qu’une plus grande prévisibilité de l’aide, de manière que les pays récepteurs soient en mesure de mener une politique à long terme.

les administrations locales sont d’importance capitale


Les pays africains sont rarement en état de formuler eux-mêmes des priorités de développement et de les réaliser ensuite. C’est ce qu’affirme Ousmane Sy, ancien ministre de l’Administration locale au Mali et lauréat du Prix International Roi Baudouin pour le Développement 2004-2005. Celui-ci ne plaide pas aveuglément pour plus d’aide car « dans la situation actuelle, l’aide qui arrive en Afrique suffoque nos sociétés et dispense nos gouvernements de leurs responsabilités. En effet, pour chaque problème, ceux-ci invitent à présenter une demande de projet au lieu de mettre sur pied leur propre politique. En outre, les maigres moyens dont disposent les gouvernements, sont utilisés presqu’uniquement dans les capitales. Il y a quelques années, le gouvernement du Mali dépensait 87 pour cent du budget à Bamako. Il est clair que de cette manière on n’aura jamais le développement desiré. »
C’est pourquoi Ousmane Sy plaide pour une décentralisation avancée de la politique du développement ; il est d’avis que le niveau politique doit se positionner aussi proche que possible des gens qu’il soutient pour que les moyens soient utilisés de façon appropriée. Une piste que la Commission européenne semble également vouloir explorer, vu que les Journées européennes du Développement qui se tiendront en novembre, mettront l’accent sur l’importance d’acteurs locaux. Il est encore difficile à concevoir comment la décentralisation dans le Sud et l’appel dans le Nord à une baisse du nombre de donateurs, qui par conséquent investiront plus d’argent, puissent aller ensemble.
Michele Ndiaye, Présidente Directrice Générale du African Institute of Corporate Citizenship à Johannesburg, explique qu’il ne s’agit pas du tout du nombre d’acteurs qui financent le développement. « Il s’agit de la capacité de canaliser l’aide et d’en tirer des bénéfices. Il suffit donc de verser plus d’argent d’aide aux gouvernements mêmes, de manière que ceux-ci puissent approfondir leurs connaissances et capacités pour ainsi mieux servir leur électorat. » Ndiaye se dépêche toutefois d’ajouter qu’elle ne demande pas de chèque en blanc. « Si on demande de l’aide au développement, on doit comprendre qu’il y aura un suivi de la façon dont celle-ci sera dépensée – après délibération commune. »

la Suède : exemple à suivre


Avec ses 46 milliards d’euros, les 27 pays de l’UE ont assuré soixante pour cent de l’ensemble de l’aide au développement officielle en 2007. Néanmoins, la coupole européenne d’ONG Concord met en garde contre l’optimisme poussé, puisqu’en 2006 l’UE dépensait encore 1,5 milliard d’euros de plus au développement que l’année passée. Les ONG affirment qu’à part cela, ces chiffres sont profondément manipulés : ils incluent de larges sommes de remises de dettes, de bourses d’études et de frais de rapatriement de réfugiés.
De plus, cette générosité relative de l’UE ne se traduit ni dans une influence de la même ordre sur l’évolution de la pensée concernant le développement – la Banque mondiale et l’ONU ont beaucoup plus d’impact – ni dans une efficacité remarquable, malgré les accords multiples des états membres de l’UE pour mieux coordonner leur politique de développement. Le secrétaire d’état suédois Joakim Stymne promet à son tour que parmi les priorités absolues de la présidence suédoise en 2009 figure la répartition des tâches promise – où chaque état membre se concentre sur un nombre limité de pays et de thèmes – mais aussi une plus grande cohérence avec des autres domaines politiques.
À ce sujet, la législation suédoise sert comme exemple aux autres pays : elle oblige toutes les ministères à confronter leur politique à l’impact sur les pays en voie de développement. Comme le réaffirme un avis du gouvernement datant de mars 2008 : « La politique de développement du gouvernement comporte aussi bien une collaboration au développement réelle et de bonne qualité qu’une politique de cohérence qui s’étend sur toutes les domaines politiques. Des tas d’autres domaines politiques disposent en effet d’outils susceptibles de réduire la pauvreté de manière plus efficace que les outils au sein de la collaboration au développement… Il est absolument nécessaire que le gouvernement utilise tous les domaines politiques et outils disponibles de manière coordonnée et cohérente afin que le pays puisse contribuer au développement mondiale de façon aussi efficace que possible. »
C’est-à-dire que cette cohérence évoquée va bien au-delà de la coordination discutée dans le forum à Accra et dans la Déclaration de Paris (2005) qui y sera évaluée. Puisque des domaines politiques comme la commerce extérieure et l’agriculture relèvent en grande partie de la responsabilité commune de l’Europe, il est d’importance capitale que l’année suivante les autres pays membres appuient les efforts suédois pour une plus grande cohérence, a ajouté encore Stymne.
Les interviews à l’occasion de cet article ont été menés comme préparation au « Development Policy Forum » organisé le 12 juin à Bruxelles par « Les amis de l’Europe ». www.friendsofeurope.org

Maak MO* mee mogelijk.

Word proMO* net als 2790   andere lezers en maak MO* mee mogelijk. Zo blijven al onze verhalen gratis online beschikbaar voor iédereen.

Ik word proMO*    Ik doe liever een gift

Met de steun van

 2790  

Onze leden

11.11.1111.11.11 Search <em>for</em> Common GroundSearch for Common Ground Broederlijk delenBroederlijk Delen Rikolto (Vredeseilanden)Rikolto ZebrastraatZebrastraat Fair Trade BelgiumFairtrade Belgium 
MemisaMemisa Plan BelgiePlan WSM (Wereldsolidariteit)WSM Oxfam BelgiëOxfam België  Handicap InternationalHandicap International Artsen Zonder VakantieArtsen Zonder Vakantie FosFOS
 UnicefUnicef  Dokters van de WereldDokters van de wereld Caritas VlaanderenCaritas Vlaanderen

© Wereldmediahuis vzw — 2024.

De Vlaamse overheid is niet verantwoordelijk voor de inhoud van deze website.