58 ans après sa mort l’héritage de Lumumba reste vivant

‘Nous sommes tous des enfants du Congo’

Wikimedia CC0

Les belgo-congolais rêvent et espèrent de voir un futur plein de promesses pour le Congo. Pour réaliser cette vision, beaucoup s’inspirent d’une seule figure, qui est considérée comme la ‘personnification de la décolonisation congolaise’: Patrice Lumumba.

Même s’il n’a pas eu la chance de pouvoir gouverner à cause de sa mort prématurée, les Congolais ont transmis son héritage: celui de combattre pour un pays souverain, digne du peuple congolais. Les jeunes congolais dans le monde entier sont devenus plus émancipés et battants. C’est exactement la raison pour laquelle la pression contre l’abus du système politique congolais agrandit.

‘Cette lutte, qui fut de larmes, de feu et de sang, nous en sommes fiers jusqu’au plus profond de nous-mêmes, car ce fut une lutte noble et juste, une lutte indispensable pour mettre fin à l’humiliant esclavage qui nous était imposé par la force.’

Dans son discours d’indépendance, Patrice Lumumba exprimait en 1960, quinze ans après la deuxième guerre mondiale, d’une manière très frappante, l’envie des congolais d’être indépendants. Pendant 80 ans, ils ont vécu sous le joug du colonisateur belge, où ils voyaient leurs richesses naturelles être canalisées à la mère patrie, et voyaient la Belgique devenir riche grâce aux millions de compatriotes qui travaillaient durement dans les mines d’argent et d’or dans le sud du pays. Mais maintenant c’en était assez: le Congo appartenait aux congolais et Patrice Lumumba était celui qui allait mener le pays à un futur prometteur.

Abandonnés et brisé de tristesse

La prise de conscience de la décolonisation n’est pas apparue du néant. Le colonisateur belge était devenu plus ‘indulgent’ les dernières années. Les ouvriers étaient autorisés à s’unir au sein des syndicats et des partis politiques pouvaient être fondées. La classe moyenne congolaise – les soi-disant évolués – s’était solidement et socialement ancrée.

Malgré le fait qu’il n’y avait que 16 universitaires à la proclamation de l’indépendance en 1960 dans le pays entier, il était question d’une classe moyenne solide avec une prise de conscience développée dans le sens décolonial parmi les congolais. C’était le terreau parfait pour les idées politiques des partis politiques différents qui prospéraient. Parmi eux, le Mouvement National Congolais avec son président Patrice Lumumba, était le premier parti qui défendait spécifiquement l’intérêt du peuple congolais au Congo Belge. Le MNC voulait – contrairement aux autres partis – unir les congolais. Le tribalisme a toujours été un grand défi au Congo – un pays avec environ 250 ethnies et 100 langues différentes.

Pas tous les congolais étaient aussi dociles que les écrits historiques veulent nous faire croire. A partir du début de la colonisation il y avait déjà des voix opposées en il y avait des gens qui rêvaient de plus de participation et moins de coercion. 80 ans après le début de la colonisation, qui avait apporté tant de douleur et de destruction, le pays était enfin indépendant. Le discours rejoignait parfaitement l’esprit du temps: les congolais étaient prêts pour s’occuper d’eux-mêmes. Le message d’unité que Lumumba portait, avait convaincu les congolais. Finalement c’est son parti, le MNC, qui était le grand vainqueur des élections de 1960.

Lumumba était aimé chez le peuple congolais, mais était haï et démonisé par le gouvernement belge. Celui-ci le trouvait dangereux: son discours nationaliste était notamment une menace pour l’élite belge, qui voulait voir ses intérêts économiques consolidés. Patrice Lumumba avait en tête un Congo indépendant auto-suffisant. Il voulait nationaliser l’industrie minière au pays: le rendement des richesses naturelles venant du sud du pays, devait aller au peuple congolais et ne pas servir à enrichir les (ex-)colonisateurs. C’est également la raison pour laquelle la Belgique a soutenu la sécession et le combat d’indépendance des provinces méridionales Katanga et Kasaï-sud: les deux provinces pouvaient compter sur les grandes réserves naturelles comme le cuivre, l’or et l’uranium. L’état du Katanga est devenu indépendant de la nouvelle République Démocratique du Congo en juin 1960, avec Moïse Tshombe à sa présidence. Le gouvernement congolais, par contre, y voyait une astuce du gouvernement belge pour la continuation de l’exploitation du sous-sol riche par les grandes entreprises belges qui exerçaient une grande influence et entretenaient de bonnes relations avec Tshombe.

Jusqu’aujourd’hui, il est difficile pour les Congolais, autant au Congo que dans la diaspora, de comprendre que leur symbole de l’indépendance après quatre-vingts ans d’oppression, leur a été enlevé d’une manière aussi horrible

Pendant les chaos politiques qui suivaient la sécession du Katanga et du Kasaï, le gouvernement belge visait une voix qui était en ce temps devenue une épine dans le pied du gouvernement. Patrice Lumumba demandait l’impossible: son plan de rendre le Congo aux congolais et de faire du pays une nation prospère dont les congolais mêmes pouvaient jouir, ne plaisait pas aux belges. Le 17 janvier 1961, Patrice Lumumba a été assassiné. Avec l’aide du gouvernement belge et de la CIA, qui a laissé achever l’œuvre par des militaires belges. Son corps a été enterré, mais a ensuite été déterré par la police belge et dissous dans l’acide. Moins d’un an après la victoire du grand unificateur du Congo, il n’y avait plus aucune trace de l’optimisme congolais. Le peuple congolais est resté orphelin et brisé de tristesse. Jusqu’aujourd’hui, il est difficile pour les Congolais, autant au Congo que dans la diaspora, de comprendre que leur symbole de l’indépendance après quatre-vingts ans d’oppression, leur a été enlevé d’une manière aussi horrible.

Un prix élevé

A la mort de Lumumba, la Belgique et les Etats-Unis d’Amérique on détruit les idéaux des Congolais. Depuis, personne d’autre n’a réussi à joindre et à réunir autant de personnes, afin de stimuler l’optimisme et la confiance en l’avenir. Aujourd’hui, le vent semble tourner. La nouvelle génération combattante semble porter à cœur plus que jamais le rêve d’unité et de paix. Cependant, le message d’espoir de Lumumba a toujours continué à vivre chez de nombreux congolais. Ce peuple a toujours continué à croire en un avenir prometteur et positif pour son pays. La différence est principalement basée sur l’émancipation et la combativité de la génération la plus jeune, autant au Congo que dans la diaspora.

Les Congolais n’ont jamais été un peuple facilement effrayé et se sont toujours battus pour leurs idéaux. Mais aujourd’hui nous avons à faire avec une jeunesse encore mieux informée et plus combattante. Il suffit de regarder le succès de la Lutte pour le Changement (LUCHA), un mouvement populaire congolais qui critique le gouvernement actuel et qui mène des actions contre sa politique.

Les morts et les arrestations sont le prix que doivent payer les jeunes Congolais pour la foi dans le changement pour leur pays. Ce sont eux qui peuvent redonner espoir au pays

Le fait que ces actes ne soient pas appréciés par le gouvernement congolais est démontré par les nombreuses violences et l’élimination des voix dissidentes. De cette manière l’activiste Rossy Mukendi (35) a été tué pendant une manifestation pacifique fin février 2018 à Kinshasa. Sa mort a fait de lui un symbole de l’opposition au Congo. En juin de la même année, Luc Nkulula, un activiste congolais et un des dirigeants de la LUCHA, est décédé dans des circonstances suspectes. Gloria Sengha, une des anciennes dirigeants de LUCHA et en ce moment fondatrice du mouvement populaire Vigilance Citoyenne (VICI-RDC), a été arrêtée mi-décembre 2016 à Kinshasa, en compagnie de Musasa Tshibanda.

Les morts et les arrestations sont le prix que doivent payer les jeunes Congolais pour la foi dans le changement pour leur pays. Ce sont eux qui peuvent redonner espoir au pays. L’espoir pour un système politique sain, espoir d’une démocratie qui respecte les droits de l’homme peut réduire la corruption et la violence dans le pays.

Une grande famille

Ainsi dans la communauté congolaise en Belgique, on se sent fortement lié avec le pays d’origine. De nombreux belges d’origine congolaise suivent de près les changements politiques. Randy Kankolongo Kalemba, membre du conseil et secrétaire d’AYO, la fraternité anversoise pour les étudiants d’origine africaine, explique qu’il admire fortement les congolais au Congo. ‘Ils se battent chaque jour pour l’émancipation de tous les congolais au monde – pour tous les enfants du Congo’, explique-t-il.

Le Congo n’a pas de liberté de presse ni de liberté d’expression. Le pays se situe à la 154ème place dans un classement de 180 pays. En comparaison: la Belgique occupe la septième place de ce classement. C’est très dangereux en RDC: les voix dissidentes risquent d’être abattues. ‘Le courage que les congolais au Congo ont est énorme, même si nous ne le réalisons pas toujours’, dit Kalemba.

La voix des congolais au Congo et dans la diaspora est cruciale selon Nadia Nsayi, également d’origine congolaise et chargée de mission chez Broederlijk Delen et Pax Christi Flandre. Elle suit de près la situation au Congo. Les dernières élections ont été remportées par Félix Tshisekedi, même si il est presque sûr à cent pour cent qu’il n’a pas obtenu la majorité des votes. En effet, selon Nsayi, il est extrêmement important de prendre en compte le choix des électeurs: ‘Le peuple congolais a dû attendre deux ans avant de pouvoir voter. Maintenant c’est important que leur choix de vote soit respecté. Ainsi en Belgique je veux exhorter les jeunes leaders d’opinion belgo-congolais, qui font entendre leur voix dans le débat de décolonisation, d’analyser la situation politique au Congo et de faire entendre leur voix constructive dans le débat.’

Selon Moussa Don Panzou, président de Waka-Waka Generation (organisation malnoise qui travaille avec des jeunes d’origine des pays africains sub-sahariens), nous devons également être conscients du fait que les congolais portent un héritage: ‘La persévérance de nos parents est maintenant en nous.’ Cette persévérance fait en sorte que la jeune génération poursuit des vrais changements au Congo. ‘Voilà pourquoi le pont entre les congolais du Congo et ceux dans la diaspora est si important. C’est un réseau mondial que nous devons renforcer,» déclare Kalemba.

Les dernières élections présidentielles ont fait sensation. Félix Tshisekedi a été élu président du Congo, mais son adversaire, Fayulu, conteste le résultats. Il s’est même rendu devant la cour constitutionnelle pour contester le résultat, mais n’a pas eu gain de cause. Le journal d’affaires Financial Times indique aussi, sur base des données qu’ils ont vues, que Martin Fayulu serait le grand vainqueur des élections présidentielles avec une majorité de 60% des voix. L’Union africaine a également exprimé ses réserves sur les résultats mais les autorités à Kinshasa n’ont pas accepté de reporter l’annonce du résultat final des élections présidentielles.

A côté de cela, Félix Tshisekedi est accusé par certains d’être un allié de Joseph Kabila, le président controversé et actuel de la RDC. Cette alliance aurait donné la victoire à Tshisekedi. Jean Omasombo, professeur à l’université de Kinshasa (UNIKIN) et chercheur chez l’AfricaMuseum à Tervuren, confirme que Kabila a négocié avec Tshisekedi, dans le but de conserver une partie du pouvoir. Selon lui ce serait également la raison pour laquelle la candidature de Tshisekedi a été acceptée, malgré le fait que l’authenticité de son diplôme avait été mise en doute lors des dernières élections. (Quelques jours avant la proclamation des résultats provisoires, l’ICC (Institut des Carrières Commerciales) Bruxelloise a confirmé que le diplôme supérieur de Tshisekedi était faux. La CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) a néanmoins accepté sa candidature, red.)

Le changement est indispensable. Le pays a un potentiel énorme, un peuple jeune et, en termes de ressources naturelles, l’un des pays les plus riches au monde. Une véritable démocratie, avec un leader choisi par le peuple pour gouverner le pays avec les meilleures intentions, voilà ce dont le Congo a besoin. Est-ce Félix Tshisekedi? Ou devrions-nous plutôt poser notre espérance sur le visage de l’opposition, Martin Fayulu? Sera-t-il capable de mettre en œuvre le véritable changement auquel aspirent tant de Congolais?

Saura-t-il mettre une fin à la violence, à la répression et à la corruption? Ou au contraire, sera-t-il – une fois au pouvoir –avalé par le système et prendra-t-il le même chemin que ses prédécesseurs, qui se sont laissés aveugler par l’argent et le pouvoir? Verrons-nous le jour où quelqu’un suivra les traces du légendaire Lumumba? Il décéda à son apogée: sa réputation était encore sans tâche – ce qui lui a donné son statut d’héros chez les congolais. Nous ne saurons jamais comment il aurait fini. Nous ne pouvons qu’espérer — espérons toujours et continuons d’espérer, ça semble que ce soit l’essence de notre histoire congolaise – voir un jour se lever un président qui tend son oreille aux besoins de son peuple et ne sera pas à la merci de l’occident.

© 2019 — StampMedia — Lieven Miguel Kandolo

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