L’extraction moderne du gravier doit tenir compte des intérêts de la nature et de la société

Gravier, l’or de la vallée de la Meuse

Raf Custers

Le bureau de Frank Liebens, directeur du groupe Steengoed Projecten se trouve encore provisoirement dans un container dans le sentier de Rooselaer du village de Rotem, à Dilsen-Stokkem. Mais de nouveaux bureaux apparaissent devant la porte et, lorsque les travaux seront finis, les installations traitant le gravier que le groupe va extraire d’un méandre sur la rive gauche de la Meuse devront suivre.

Steengoed Projecten pense pouvoir extraire au moins 20 millions de tonnes de gravier dans les 15 prochaines années. Sauf si une nouvelle crise de la construction se présente, comme 4 à 5 ans auparavant. La vente, principalement aux bétonneuses, avait alors sensiblement diminué.

Le gravier a depuis longtemps mauvaise réputation. Il y avait beaucoup d’opportunistes dans ce business, qui récoltaient ce qu’ils pouvaient sans se préoccuper d’autres choses ou personnes. De la surexploitation pure. Ils virent la mesure dans laquelle les producteurs de béton dans les années 1960-70 ambitionnaient un gravier abordable, pour les autoroutes belges et les travaux du plan Delta aux Pays-Bas.

Les cow-boys du gravier

Le Limbourg était la seule région source de gravier, gravier de vallée issu des rives de la Meuse et gravier de montagne sur les flancs du Plateau de la Campine. Le courant achemine les cailloux depuis les Ardennes et les dépose dans cette région, dans son lit et ses méandres.

C’était sans compter les cow-boys du gravier impliqués dans des affaires pas très nettes avec les barons des déchets. La fin des années 1990 nous raconta, tout près, juste au-delà de la frontière du Limbourg néerlandais, que les passages aménagés par l’extraction du gravier étaient remplis de substances chimiques toxiques. L’argent avait alors son influence.

Des pratiques aujourd’hui socialement sanctionnées souligne le directeur de Steengoed Projecten, Frank Liebens. « C’est alors que vous parviennent les déclarations d’opposition et les appels ». Il fallait donc que cela change.

Les cow-boys durent donc arrêter l’extraction de gravier le long de la Meuse. Toutefois, le gravier n’était pas épuisé. Les sérieux producteurs de gravier cherchèrent une manière de continuer leurs activités. Le gouvernement flamand a entre-temps durci les règles.

Cet obstacle est franchi un quart de siècle plus tard : le secteur du gravier déploie un nouvel élan, parfaitement illustré par le projet d’Elerweerd à Dilsen-Stokkem.

Elerweerd, un projet de l’initiative collective de la société coopérative à responsabilité limitée Steengoed Projecten et de l’ASBL Maasvallei, a obtenu son permis en mars de cette année. Il n’a pas été fait appel, ce qui prouve que la préparation du projet a bien avancé, déclare le directeur de Steengoed Projecten Frank Liebens.  

Terrassement par étapes

Gust se repose d’un petit trajet sur la piste cyclable de Winterdijk. Il n’est jamais allé très loin, il travaille ici depuis 43 ans pour des entreprises de gravier.

Des travaux de terrassement entre le passage le long de l’eau et la rive de la Meuse sont en cours. Les graviers encore extraits sur le site sont convoyés vers les stocks de Steengoed Projecten.

Raf Custers

C’était une concession de gravier pour la firme Bichterweerd, une entreprise qui n’avait rien à se reprocher selon Gust. Elle transportait 6000 tonnes de gravier par jour à la belle époque. Comme il fallait, avec de véritables hommes de métier qui nettoyaient derrière eux quand leur chantier était fini.

C’est ainsi que Steengoed Projecten souhaite également procéder avec Elerweerd. Le groupe va terrasser un méandre de la Meuse. À mesure que le travail est repoussé, la zone vidée de gravier se remplit à nouveau complètement naturellement.

Selon ce concept, l’extraction de gravier est un instrument à d’autres fins. Dans le cas du projet Elewaard, il s’agit d’un moyen de renforcer la sécurité lors des crues dans un territoire inondable. Et cela ajoute aussi un domaine naturel varié à Elen, le hameau de Dilsem-Stokkem.

Tous les membres du secteur du gravier doivent désormais mettre sur pied de tels projets et les soumettre au comité gravier du gouvernement flamand, constitué non seulement de la province mais aussi de toutes les communes productrices de gravier, du Boerenbond (la ligue des agriculteurs flamands), du mouvement écologiste et des entreprises de gravier.

Les projets ne peuvent commencer qu’avec l’accord unanime du comité gravier. C’est le résultat de dizaines d’années de concertation avec le gouvernement. Elerweerd – « un projet social de grand intérêt public lié à Projectgrindwinnning » selon les initiateurs, s’inscrit dans ce schéma.

Raf Custers

Le directeur de Steengoed, Frank Liebens met les aspects positifs d’Elerweerd en évidence.

Des murs antibruit ont par exemple été bâtis à côté de la nouvelle porte d’entrée, où circulent chaque jour quelque 250 camions afin de charger le gravier. Steengoed Projecten va aussi aménager un système d’irrigation des champs pour dédommager les paysans qui ont perdu des terres à cause du projet Elerweerd. Ce système d’irrigation coûterait 1,8 million d’euros.

Frank Liebens préfère ne pas révéler le montant total de l’investissement. Finalement, et c’est le principal, le consortium de Steengoed peut continuer à extraire du gravier et à le commercialiser.

Extraction d’ « intérêt social »

L’avenir semblait tout autre il y a 25 ans. Le secteur du gravier à l’époque se dirigeait vers un arrêt total de la production, qui serait en vigueur à partir du 1er janvier 2006. C’est ce qu’avait décidé en ce temps-là le ministre de l’Économie Norbert De Batselier (SP). Cette décision fut entérinée dans le décret sur le gravier de 1993.

Le décret fixa un quota et un scénario de démantèlement pour les firmes de gravier. Elles devaient verser des sommes dans un Fonds gravier créé par le gouvernement, visant à financer des projets utiles dans les communes productrices de gravier. Les prélèvements s’élevaient jusqu’à 1,5 euro la tonne autour du changement de siècle et fournirent au total environ 7,5 millions d’euros pour le Fonds gravier.

Le décret sur le gravier a connu de multiples révisions depuis 1993. En concertation avec toutes les parties concernées fut inventée la formule du Projectgrindwinning, permettant de poursuivre l’activité, mais en tant qu’activité inscrite dans des projets plus larges d’intérêt social.

Mais les entreprises et le gouvernement ne s’entendaient pas toujours bien. Il y a cinq ans le Fonds gravier ne savait plus quoi faire de la somme récoltée, qui s’élevait alors à 16 millions d’euros. Le secteur du gravier exigea l’argent de retour, mais battit en retraite.

La tension est entre-temps retombée. Les firmes se sont fait écouter par les mandataires politiques de la région. Des politiques des partis flamands majoritaires N-VA, CD&V et Open VLD ont émis une nouvelle proposition d’assouplissement du décret sur le gravier. Les communes attendent d’encaisser le pourcentage des prélèvements de la poursuite des extractions.

La drague Pluto

L’extraction à l’ancienne tend à disparaître. Les dégâts causés au plateau de la Campine, liés à l’extraction du gravier de montagne, sont réparés et la nature reprend ses droits sur le domaine.

À Kessenich, 20 kilomètres au nord, la drague Pluto absorbe encore du gravier de vallée du bassin De Spaanjerd. Elle est propriété de Belmagri, un des sept actionnaires de Steengoed Projecten.

Raf Custers

Mais la drague Pluto termine ici un ancien contrat. Si l’on continue à draguer de ce côté-ci du Spaanjerd, un grand port de plaisance se trouve maintenant du côté sud. En l’espace de quelques années, ce lac sera entièrement transformé en espace récréatif. 

Envie de vous rendre le long du méandre à gravier dans la vallée de la Meuse ?

Raf Custers

Le Tour des mines belges

Raf Custers a enfourché son vélo pour une excusrsion à la découverte de l’industrie extractive belge. Il s’est intéressé au sable de Campine, à des briques artisanales, à une nouvelle mine de zinc, à des géants du calcaire et surtout aux conflits entre l’homme, l’environnement et l’économie. 

Prenez le train Brussel-Genk, le bus De Lijn 45 en direction de Maaseik, descendez à Rotem. Prenez le vélo (pliable) depuis Steengoed et empruntez la Winterdijk (itinéraire à vélo de la Meuse 19/ itinéraire à vélo flamand LF7 en direction du point-nœud 26) le long d’Heppeneert et Aldeneik vers le bassin De Spaanjerd (à Kessenich).

Comme aucun bus n’y circule en été : demandez un lift jusqu’au terminus du bus 45 à Maaseik pour rentrer chez vous.

Traduit du néerlandais par Geneviève Debroux

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Over de auteur

  • Schrijver, journalist en onderzoeker

    Raf Custers is schrijver, historicus en journalist en publiceerde onder andere Grondstoffenjagers (2013) en De uitverkoop van Zuid-Amerika (2016).

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